Un critère basé sur l’estimation du chiffre d’affaire à venir est-il valable ?
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En l’espèce, la société Bijou Plage, candidat évincé d’une procédure de la commune de Cannes après classement de son offre en quatrième position sur huit candidats conviés aux négociations, a introduit un référé précontractuel. Le juge du tribunal administratif de Nice a annulé la procédure de passation de la commune de Cannes « au motif que la commune de Cannes avait dénaturé l’offre de la société Bijou Plage pour l’appréciation du critère financier de sélection ». À la suite de cette ordonnance du juge des référés, la commune de Cannes s’est pourvue en cassation.
Le Conseil d’État a statué qu’ « en se bornant à annuler la procédure après avoir relevé ce manquement, sans rechercher si ce critère irrégulièrement appliqué avait eu une influence globale sur le classement de l’offre et si, par suite, la société Bijou Plage, candidat évincé, était susceptible d’avoir été lésée par lui, le juge des référés a commis une erreur de droit. Il suit de là que la commune de Cannes est fondée, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de son pourvoi, à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ».
Entre autres moyens, la société requérante a soutenu que les négociations avec les candidats se sont déroulées en méconnaissance du principe d’égalité de traitement entre tous les candidats du fait de l’irrégularité de la composition de la commission de négociation. Il résulte de l’instruction que « la seule circonstance que certains membres de cette commission n’ont pas assisté à l’entretien de négociation avec la société Bijou Plage n’est pas de nature à établir la méconnaissance du principe d’égalité de traitement entre les candidats ».
Le Conseil d’État a profité de cette affaire pour apporter d’utiles précisions concernant la régularité des critères d’analyse des offres.
Dans un premier temps, il est rappelé que « s’’il est loisible à l’autorité concédante de retenir au stade de l’examen de la valeur des offres, à la condition qu’ils soient non discriminatoires et liés à l’objet de la concession, des critères relatifs à la qualification et à l’expérience des personnels affectés à l’exécution des prestations mêmes qui font l’objet de la concession, afin d’en garantir la qualité, […] elle ne peut, en revanche, se fonder sur des critères tenant aux capacités générales de l’entreprise qu’au stade de l’examen des candidatures, de tels critères étant étrangers à l’appréciation de l’avantage économique global d’une offre. »
Il est donc possible de prévoir des critères d’analyse des offres relatifs à la qualification et à l’expérience des personnels affectés à l’exécution des prestations qui font l’objet de la concession, sous réserve que ceux-ci n’aient pas de lien avec l’appréciation des capacités générales de l’entreprise qui relève de l’examen des candidatures.
Dans un second temps, le Conseil d’État retoque l’utilisation d’un sous-critère intitulé « budget provisionnel, montant et financement des investissements ». Il résulte de l’instruction qu’un tel critère, « qui repose sur les seules déclarations des soumissionnaires, sans engagement contractuel de leur part et sans possibilité pour la commune d’en contrôler l’exactitude, n’est pas de nature à permettre la sélection de la meilleure offre au regard de l’avantage économique global pour l’autorité concédante. Il est dès lors irrégulier. »
Il convient toutefois de noter que bien que le sous-critère soit irrégulier il faut également qu’il ait pu léser l’entreprise requérante pour que le moyen puisse être invoqué. En l’espèce, faute d’avoir eu une influence globale sur le classement de son offre, l’irrégularité du sous-critère financier n’a pas été susceptible de léser la société Bijou Plage.
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