Acheteurs, motiver l’abandon de votre procédure n’est pas une option !

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La décision de déclaration sans suite d’une procédure de marché public par l’acheteur n’est jamais dénuée de conséquence pour les opérateurs économiques qui se voient privés d’un manque à gagner, s’ils étaient pressentis attributaires, ou amputés des frais engagés pour présenter leurs offres, s’ils n’étaient que soumissionnaires.

Par un arrêt n° 20MA03415 en date du 13 septembre dernier, la cour administrative d’appel de Marseille (CAA) a fermement réaffirmé le principe selon lequel la déclaration sans suite d’une procédure de marché public doit être motivée et les opérateurs économiques informés de ces motifs. La question avait d’ailleurs déjà été réglée par réponse ministérielle, dont on vous parle ici

Pour rappel, l’article R.2185-2 du code de la commande publique dispose en ce sens que « Lorsqu’il déclare une procédure sans suite, l’acheteur communique dans les plus brefs délais les motifs de sa décision de ne pas attribuer le marché ou de recommencer la procédure aux opérateurs économiques y ayant participé ». Par suite, le défaut ou l’insuffisance de motivation de la décision sans suite constitue une illégalité susceptible d’être soulevée à l’appui, notamment, d’un recours en excès de pouvoir contre ladite décision, le cas de l’appel interjeté devant la CAA de Marseille en l’espèce.

La cour rappelle, en cette circonstance, la faculté laissée aux acheteurs de déclarer sans suite leurs procédures de marchés publics avant contractualisation. En effet, « quels que soient la nature et le régime du contrat dont le projet de passation fait l’objet d’un avis d’appel public à la concurrence, la personne publique peut renoncer à contracter, dès lors que cette renonciation repose sur un motif tiré de l’intérêt général qu’elle communique dans les plus brefs délais aux opérateurs économiques ayant participé à la procédure. » Cette possibilité est donc soumise à deux conditions cumulatives :

  • la renonciation doit reposer sur un motif d’intérêt général, par exemple :
    • la nécessité de redéfinir le besoin apparu en cours de passation (CAA Bordeaux, 8 janvier 2003, Société Goppuin, n° 05BX01006),
    • la disparition du besoin de l’acheteur (CAA Bordeaux, 8 janvier 2008, n° 05BX01006),
    • l’insuffisance de concurrence, etc.

  • ce motif doit être communiqué dans les plus brefs délais aux soumissionnaires.


Une question se pose alors : quel est le degré de détails à transmettre aux opérateurs économiques ayant participé à la procédure ?

Dans cette affaire, l’acheteur a décidé de classer la procédure sans suite en raison de « l’existence de vices affectant sa sécurité juridique et qui seraient de nature à conduire à l’annulation du contrat en cause si elle était poursuivie » sans pour autant expliciter ces motifs. Dès lors, la motivation de la déclaration sans suite, bien qu’existante, ne répond pas pour autant aux exigences de la réglementation positive du fait de son imprécision. La CAA juge sur ce point que « la commune n’a, en revanche, pas indiqué dans ce courrier, même si elle n’était pas tenue d’en donner la liste détaillée, la dénomination générique des vices relevés. »

Aux deux conditions cumulatives précédemment énumérées, vient donc s’ajouter celle d’une motivation suffisamment précise et explicite pour justifier la déclaration sans suite du marché public.

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