A vos marques, prêts, spécifiez !
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Les spécifications techniques sont toujours un moment primordial dans la bonne définition du besoin telle que prévue par le code de la commande publique à son article L 2111-1 « La nature et l’étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avec précision avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale ». Or, la frontière est parfois ténue entre une description orientée et une réelle nécessité technique interne. La jurisprudence a de nouveau fait couler de l’encre sur ce sujet.
Dans un arrêt du 6 avril 2021, la cour administrative d’appel de Nancy a eu à examiner un litige lié à l’utilisation d’une marque dans un cahier des charges techniques par l’acheteur public. Dans une procédure d’appel d’offres pour l’attribution d’un marché public ayant pour objet la fourniture de points lumineux, supports et pièces détachées, divisé en trois lots, l’acheteur public a résilié unilatéralement le contrat en raison de l’irrégularité entachant la procédure de passation du marché. Cette résiliation a notamment été justifiée par l’application de l’article 6 – IV du code des marchés publics, alors en vigueur, désormais repris à l’article R. 2111-7 du code de la commande publique : « Les spécifications techniques ne peuvent pas faire mention d’un mode ou procédé de fabrication particulier ou d’une provenance ou origine déterminée, ni faire référence à une marque, à un brevet ou à un type, dès lors qu’une telle mention ou référence aurait pour effet de favoriser ou d’éliminer certains opérateurs économiques ou certains produits. Toutefois, une telle mention ou référence est possible si elle est justifiée par l’objet du marché ou, à titre exceptionnel, dans le cas où une description suffisamment précise et intelligible de l’objet du marché n’est pas possible sans elle et à la condition qu’elle soit accompagnée des termes : « ou équivalent » (…) »
Or dans la procédure objet du litige, l’acheteur avait imposé dans ses documents contractuels de recourir aux fabricants présélectionnés, pour huit sur quatorze produits s’agissant du lot n° 1 et deux sur cinq pour le lot n° 2. De plus, le détail quantitatif estimatif du lot n° 3, était intégralement pré-renseigné par le pouvoir adjudicateur quant aux produits des fabricants à utiliser et cela sans la notion « ou équivalent ».
L’historique de ce marché permet au juge de voir l’impact de cette absence de mention dans les documents puisque lors de la consultation de 2006 sur le même objet, 27 sociétés avaient soumissionné contre une seule société lors de la relance en 2010 et 2014 sans la notion « ou équivalent ». De surplus, suite à la résiliation et à la relance du marché comprenant cette notion, 7 entreprises ont pu de nouveau remettre une offre.
Cette démonstration permet de mettre en avant que la spécification imposée par le pouvoir adjudicateur a eu pour effet de fermer le marché et ainsi de contrevenir aux dispositions de l’article R. 2111-7 du code de la commande publique. C’est ainsi légalement que le pouvoir adjudicateur a pu résilier le marché.
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