Promotion de l’achat public local et satisfaction des impératifs juridiques : des enjeux incompatibles ?
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C’est bien connu, le droit français, appuyé par le droit de l’Union européenne, fait obstacle à la prise en compte d’un critère géographique dans l’attribution des marchés publics. Et pourtant, la promotion d’une préférence locale dans la commande publique n’a de cesse de faire couler beaucoup d’encre, encore plus à l’aune de la crise sanitaire du coronavirus.
Questionné par une députée sur « la typographie des opérateurs économiques soumissionnaires dans le cadre d’une procédure de passation d’un contrat de la commande publique », « notamment concernant la répartition géographique des opérateurs économiques retenus, ainsi que la taille de ces entreprises », le Ministre de l’Economie, des Finances et des Relances, Bruno Le Maire, a réaffirmé avec conviction les grands principes de liberté d’accès à la commande publique et de non-discrimination des entreprises.
Deux antinomies se heurtent alors : celle de privilégier les entreprises implantées localement dans l’attribution des marchés publics, notamment pour accroître l’insertion des PME, encourager l’achat local et répondre à des préoccupations environnementales ; et celle de respecter les grands principes de la commande publique que sont l’égalité de traitement, la liberté d’accès et la transparence des procédures.
Mais alors, quels leviers disponibles pour favoriser l’achat local sans se risquer à transgresser les règles en vigueur ?
A l’appui de son développement, le Ministre cite tout d’abord la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi ASAP du 7 décembre 2020, qui a pérennisé les politiques d’achat public en favorisant le développement économique et l’innovation des entreprises grâce à des leviers tels que le relèvement du seuil pour les marchés de travaux passés de gré à gré ou encore l’accès des PME et des artisans à tous les marchés globaux.
Sans pour autant admettre la prise en compte d’un critère géographique dans l’attribution des marchés publics, sont réitérés par le Gouvernement les moyens d’action mis à la disposition des acheteurs pour impulser l’accès des entreprises locales à la commande publique :
- La mise en œuvre d’un « sourcing précis», qui doit permettre de bien connaître la richesse de l’offre européenne et française.
- La bonne formulation des besoins des acheteurs « selon des spécifications techniques et des conditions d’exécution qui visent à promouvoir les offres de qualité, innovantes, protectrices de l’environnement, domaines dans lesquelles les entreprises françaises et européennes sont très compétitives ».
- La prise en compte d’objectifs de développement durable en imposant des conditions d’exécution des marchés en ce sens ; on pense notamment ici aux circuits courts.
- L’allotissement, qui est le principe en commande publique et non l’exception, car facilitant l’accès des PME.
- La promotion de l’achat durable dans le cadre du plan de relance porté par le Gouvernement mais également par le biais du projet de loi visant à mettre en œuvre les mesures proposées par la convention citoyenne pour le climat ainsi que le prochain Plan National d’Action pour les Achats Publics Durables (PNAAPD).
Ces astuces s’inscrivent dans la lignée de celles déjà mises en avant dans une réponse ministérielle en date du 25 février 2020 et laissent place à un questionnement plus global sur les possibilités laissées aux entités adjudicatrices de rejeter des offres dont plus de la moitié des fournitures proviennent de pays tiers avec lesquels l’Union européenne n’a pas d’accord commercial.
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